Spotify et la publicité – Une imposture masquée par le Premium
Spotify adore se présenter comme le champion mondial du streaming musical. L’entreprise aime parler d’innovation, de communauté, d’avenir du son. Mais derrière ce vernis marketing se cache une vérité embarrassante car sa régie publicitaire est un échec. Pire encore, elle n’a jamais vraiment été une priorité.
Daniel Ek, le PDG, a beau répéter qu’il veut faire de la publicité 20 % du chiffre d’affaires, la réalité est cruelle. Elle plafonne à 11 % et recule même légèrement. Pendant ce temps, le Premium, vache à lait de la firme, continue d’exploser. On comprend vite où va l’attention du management. Le problème est structurel. La plateforme vit d’un modèle schizophrène. Plus il convertit d’utilisateurs gratuits en abonnés payants, plus il réduit l’audience pour ses annonceurs. Mais s’il rend l’offre gratuite trop attractive, personne n’a intérêt à basculer vers le Premium. Résultat, la publicité n’est pas un vrai business, mais une simple passerelle vers l’abonnement.
L’exemple des podcasts illustre ce fiasco. Plus d’un milliard de dollars dépensés pour racheter des studios et signer des exclusivités avec Joe Rogan (podcasteur problématique américain) ou les Obama. Le rêve était séduisant: diversifier les revenus, attirer des annonceurs premium. Mais la réalité est grotesque: programmes annulés, licenciements, stratégie brouillonne, tarifs publicitaires ridicules via Megaphone. Les podcasteurs dénoncent des CPM (coûts pour mille impressions) à 8 ou 9 dollars quand les annonces lues par les animateurs se vendent 30 ou 40. Quel gâchis.
Et quand les clients se tournent vers la régie, que trouvent-ils ? Un service client en lambeaux, des équipes commerciales décimées, des campagnes mal gérées avec des publicités regroupées n’importe comment. Certaines agences attendent plusieurs jours pour obtenir une réponse quand la concurrence livre en quelques heures. Difficile de croire que Spotify prend ce marché au sérieux. Le départ du patron de la publicité, Lee Brown, présenté comme le bouc émissaire idéal, ne change rien au fond du problème. Car tant que la pub ne sera pas traitée comme une activité stratégique, le successeur héritera d’un champ de ruines.
Spotify multiplie les annonces cosmétiques: Ad Exchange maison, IA générative, laboratoire créatif… Des gadgets censés préparer un rebond d’ici 2026. Mais les annonceurs ne veulent pas de poudre aux yeux. Ils exigent de la transparence, de la performance, une vision claire. Trois choses que la plateforme est incapable d’offrir. La question devient alors brutale: a-t-elle seulement l’ADN d’une régie publicitaire ? Tout laisse à penser que non. Car au fond, la publicité n’a jamais été qu’un levier pour pousser les utilisateurs vers le Premium, ce qui en dit long sur la hiérarchie des priorités. Si Spotify ne change pas radicalement de culture, sa régie restera ce qu’elle est aujourd’hui, un distributeur de pubs au rabais, coincé entre son obsession pour l’abonnement et son incapacité chronique à comprendre les annonceurs.