Romain Leclaire

News Tech et Culture Numérique

Il y a dans la Silicon Valley une tendance bien connue, chaque fois qu’une nouvelle technologie surgit, on lui prête le pouvoir de rayer d’un trait tout ce qui l’a précédée. Le « vibe coding », cette approche popularisée par Andrej Karpathy qui consiste à donner des instructions à une intelligence artificielle pour qu’elle génère du code, n’échappe pas à cette règle. Certains commentateurs y voient déjà la fin des logiciels de productivité tels que nous les connaissons. Une vision, à mon sens, simpliste et surtout erronée.

Car l’histoire de la technologie en est la preuve. Les grandes innovations ne se substituent pas immédiatement aux outils existants, elles les transforment et les complètent. Reid Hoffman, cofondateur de LinkedIn, l’a rappelé récemment dans son podcast Possible. Quand le mobile a explosé au début des années 2010, beaucoup ont cru que le PC allait disparaître. Résultat, non seulement l’ordinateur personnel existe toujours, mais il continue de jouer un rôle central, notamment dans les usages professionnels. Le mobile n’a pas tué le PC, il l’a simplement obligé à se réinventer.

Le même raisonnement vaut pour le vibe coding. Imaginer que cette pratique va effacer les logiciels de productivité relève d’un réflexe exagéré, presque pavlovien, qui confond nouveauté et remplacement. Oui, le vibe coding va prendre de l’ampleur. Oui, il deviendra sans doute une compétence recherchée dans les métiers du développement. Mais il ne rendra pas obsolètes les outils qui structurent notre quotidien de travail: les suites bureautiques, les logiciels de gestion de projets, les plateformes collaboratives. Au contraire, il pourrait bien les renforcer en automatisant certaines tâches répétitives et en libérant du temps pour ce qui compte vraiment, la créativité, l’analyse, la stratégie.

En réalité, les annonces de « mort » technologique en disent souvent plus sur notre fascination pour le futur que sur l’avenir réel des usages. Nous aimons l’idée de rupture radicale, presque hollywoodienne, où une innovation balaye tout sur son passage. Pourtant, la technologie progresse rarement de cette façon. Elle procède par couches, par ajustements successifs, par hybridations. L’IA et le vibe coding ne feront pas exception. Ils viendront enrichir nos outils existants au lieu de les reléguer au musée numérique.

Il est d’ailleurs révélateur que Reid Hoffman, investisseur aguerri, insiste sur la coexistence plutôt que sur l’opposition. De son point de vue, miser sur une technologie émergente ne signifie pas tourner le dos aux infrastructures établies. Celles-ci persistent souvent plus longtemps qu’on ne le croit. Et lorsqu’elles déclinent, c’est rarement à cause d’une nouveauté soudaine, mais parce qu’elles n’ont pas su évoluer.

En fin de compte, la vraie question n’est pas de savoir si le vibe coding tuera les logiciels de productivité, mais comment ces deux mondes vont dialoguer. Si l’histoire nous apprend quelque chose, c’est que la productivité ne disparaît pas, elle change de forme. Alors cessons d’annoncer trop vite la fin d’outils qui, loin d’être condamnés, trouveront une nouvelle jeunesse au contact de l’intelligence artificielle.

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Le procès antitrust intenté contre Google aux États-Unis continue de produire des rebondissements inattendus. Dernier en date, Ecosia, le moteur de recherche à but non lucratif basé à Berlin, a déposé une proposition étonnante. Son fondateur, Christian Kroll, demande à obtenir pour dix ans la gestion de Chrome, le navigateur phare de Google, plutôt que de voir ce dernier vendu à une autre entreprise technologique. Cette idée, qu’il reconnaît lui-même « absurde » au premier abord, s’inscrit pourtant dans un contexte judiciaire très sérieux.

En 2024, le juge Amit Mehta a rendu une décision historique, concluant que Google détenait un monopole illégal dans la recherche en ligne et la publicité numérique. Depuis, le débat se concentre sur les remèdes à appliquer. Le département américain de la justice a suggéré plusieurs options, dont l’une des plus radicales, forcer le géant du numérique à se séparer de Chrome. L’hypothèse d’une cession du navigateur web a immédiatement attiré les convoitises. Plusieurs entreprises ont manifesté leur intérêt. OpenAI a laissé entendre qu’elle pourrait se positionner, tandis que la startup Perplexity a franchi une étape supplémentaire en formulant une offre non sollicitée de 34,5 milliards de dollars. Cette proposition a toutefois été largement critiquée comme étant bien en dessous de la valeur réelle de Chrome. Des analystes estiment que ce dernier pourrait générer jusqu’à 1 000 milliards de dollars de revenus sur la prochaine décennie, ce qui porterait sa valorisation potentielle à plusieurs centaines de milliards.

Dans ce contexte, la démarche d’Ecosia tranche avec les logiques financières habituelles. Plutôt que de participer à une course aux enchères, Christian Kroll propose que Chrome soit confié à son organisation à but non lucratif, sans paiement initial. Le modèle qu’il avance est simple: Ecosia gérerait le navigateur pendant dix ans et consacrerait 60 % des revenus générés par son utilisation à des projets environnementaux. Les 40 % restants, estimés par Ecosia à environ 400 milliards de dollars sur dix ans, reviendraient directement à Google. Le géant californien en conserverait par ailleurs la propriété intellectuelle, ainsi que son statut de moteur de recherche par défaut dans le navigateur. À l’issue de la période, la gestion pourrait être réévaluée ou transférée à une autre entité. Ecosia précise que les fonds récoltés seraient investis dans des actions concrètes: protection des forêts tropicales, programmes de reboisement et d’agroforesterie, soutien aux communautés locales, poursuites judiciaires contre les pollueurs et développement de technologies d’intelligence artificielle respectueuses de l’environnement.

Si la proposition peut sembler irréaliste, Ecosia met en avant son expérience et ses partenariats pour la rendre crédible. Fondée en 2009, la société fonctionne déjà sur un modèle singulier, elle reverse l’essentiel de ses revenus publicitaires à des projets écologiques. Chaque mois, elle distribue plusieurs millions d’euros à des ONG et à des initiatives locales dans plus de 35 pays. Elle entretient par ailleurs une relation de longue date avec Google. Son moteur de recherche repose en partie sur la technologie de la firme américaine, dans le cadre d’un accord de partage de revenus. L’organisation a également lancé son propre navigateur basé sur Chromium, la version open source qui sert de fondement à Chrome. Dans sa proposition, Kroll assure qu’Ecosia serait en mesure de maintenir les équipes actuelles de Google travaillant sur Chrome, garantissant ainsi la continuité du développement et de la sécurité du navigateur.

L’objectif affiché par Ecosia dépasse la simple ambition de prendre le contrôle de Chrome. Pour son PDG, il s’agit surtout d’amener le juge Amit Mehta à envisager d’autres options que les solutions habituelles, soit une vente à un acteur privé, soit la création d’une société indépendante issue d’un « spin-off ». Selon lui, ces schémas ne feraient que perpétuer la concentration de richesses et de pouvoir au sein des grandes entreprises technologiques. En proposant une gestion à but non lucratif, Ecosia cherche à démontrer qu’il est possible d’imaginer une autre voie, où un produit aussi central qu’un navigateur internet pourrait servir des objectifs sociétaux plutôt que strictement financiers.

« Nous avons déjà montré que nous pouvions rendre possible l’impossible », déclare t-il, qui espère au minimum élargir le champ de réflexion du tribunal.

La probabilité que la justice américaine confie Chrome à une organisation comme Ecosia reste extrêmement faible. Néanmoins, l’initiative a le mérite de lancer le débat: faut-il se contenter de transférer les actifs d’un géant de la tech à un autre, ou bien imaginer des solutions inédites où le numérique serait mis au service du bien commun ? Pour Google, le dossier reste sensible. L’entreprise a déjà annoncé son intention de faire appel de la décision de 2024, tout en refusant jusqu’ici toute idée de cession. De leur côté, les concurrents disposent de moyens financiers considérables pour tenter de s’approprier le navigateur, ce qui rend la proposition d’Ecosia davantage symbolique que réellement compétitive. Reste que dans cette affaire, l’organisation berlinoise a déjà atteint un premier objectif: faire entendre une voix différente dans un débat dominé par les chiffres astronomiques des grandes manœuvres technologiques.

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À New York, Google organisait hier son grand raout annuel, « Made By Google 2025 ». Sur le papier, c’était censé être une célébration technologique: lancement du Pixel 10, de la Pixel Watch 4, et démonstration de la supériorité de l’intelligence artificielle maison, Gemini. Dans les faits ? Un spectacle digne d’une émission de télé-achat, saturé de stars hollywoodiennes, de gags forcés et de piques à peine voilées contre Apple. Autant dire que la firme de Mountain View a surtout prouvé une chose, son besoin maladif d’exister dans l’ombre de son rival.

Le coup d’envoi est donné par Jimmy Fallon, parachuté maître de cérémonie, visiblement plus habitué aux sketchs potaches qu’aux annonces de produits high-tech. Face à lui, Rick Osterloh, le vice-président de Google en charge des plateformes et des appareils, tente tant bien que mal de faire passer son message: « Beaucoup de promesses ont été faites, mais Gemini est la vraie révolution », lâche-t-il en visant Cupertino, accusé d’accumuler les retards dans son déploiement d’Apple Intelligence. La salle a applaudi, mais la démonstration tenait davantage du coup de griffe opportuniste que de l’argument solide. Car si Apple a pris du retard sur l’intégration de l’IA dans Siri, l’entreprise assume sa prudence. Google, lui, préfère la fuite en avant, déballer des fonctionnalités pas toujours stabilisées et déguiser cette précipitation en audace. Dans une publicité récente pour le Pixel 10, la marque s’est même amusée: « Si vous achetez un téléphone pour une fonctionnalité bientôt disponible mais qu’elle le reste pendant un an, vous devriez peut-être revoir la définition de bientôt, ou changer de téléphone. » C’est drôle, certes, mais on ne peut s’empêcher de voir le géant californien se rassurer lui-même.

Fallon, lui, s’est prêté au jeu du bateleur en agitant sous les yeux d’Osterloh une affiche reprenant un commentaire Reddit: « Les iPhones ne prennent pas les meilleures photos. » Rires convenus, applaudissements et une impression persistante de mise en scène grossière. La subtilité n’est pas au rendez-vous ce soir. Adrienne Lofton, vice-présidente marketing de Google, enfonce le clou en s’attaquant au « jardin clos » d’Apple. L’argument est connu: iOS enfermerait ses utilisateurs, là où Android incarnerait l’ouverture et la liberté. Un refrain mille fois entendu, brandi comme une vérité universelle, mais qui oublie de préciser que cette fameuse liberté s’accompagne aussi d’une fragmentation logicielle et d’une expérience utilisateur souvent inégale. Lofton rappelle également la guerre des bulles vertes et bleues, ce conflit de messagerie qui traîne depuis des années entre Android et iPhone. Google avait lancé en 2022 la campagne #GetTheMessage, exigeant que la marque à la pomme adopte le protocole RCS. Apple l’a finalement fait en 2024, améliorant la qualité des photos et vidéos, mais les messages Android restent verts. « C’est dépassé, on ne veut plus en parler », assure t-elle. Pourtant, Google lui-même a fait de ce détail un cheval de bataille marketing.

Et puis il y a eu la surenchère de célébrités. Dès les premières minutes, un clip aligne Alex Cooper, Steph Curry, Bryson DeChambeau ou encore Lando Norris, comme s’il s’agissait de vendre une boisson énergisante plutôt qu’un smartphone. Sur scène, Jimmy Fallon affiche ses conversations fictives avec Joe Jonas et Steph Curry, feignant d’être un utilisateur ravi. Cooper fait un détour pour montrer les fonctions photo du Pixel 10, Cody Rigsby transpire sur la Pixel Watch 4, et les Jonas Brothers clôturent le show avec un clip filmé évidemment sur le Pixel. Cette pluie de stars, coûteuse et envahissante, masque mal le manque d’âme de l’événement. Google semble convaincu que pour capter l’attention, il faut saturer l’écran de visages connus, quitte à transformer une keynote en télé-réalité sponsorisée. Résultat, un show souvent gênant, où le présentateur américain, incapable de cacher son désintérêt, multiple les questions triviales et les blagues forcées. Son cri « I P 6 8 ! I P 6 8 ! » pour célébrer l’étanchéité des Pixel, déjà présente depuis 2018 restera comme un moment de malaise, preuve que Google croit avoir trouvé là un argument choc.

Le plus triste ? Derrière cette mise en scène clinquante dont on connaissait déjà tout à l’avance (car chez Google on s’est dit que c’était une bonne idée d’autoriser la presse spécialisée à pouvoir publier les annonces une heure avant l’événement), il y avait pourtant de vraies innovations à présenter. Le Pixel 10 marque une étape importante dans l’intégration de l’IA au quotidien: traduction en direct, aide contextuelle, nouvelles approches de la photo et de la recherche. Autant de fonctionnalités qui auraient mérité des démonstrations concrètes, intelligentes, et surtout sincères. Au lieu de ça, l’entreprise a préféré noyer son message sous une avalanche de stars et de slogans bidons.

Le contraste avec Apple est flagrant. La firme de Cupertino n’est pas exempte de critiques, mais elle a au moins compris une chose, ses keynotes s’adressent d’abord à ceux qui s’intéressent vraiment à la technologie. Les spectateurs viennent pour voir des produits, des démos précises, des annonces claires. Chez Google, on a eu droit à un Jimmy Fallon qui joue les consommateurs moyens, demandant pourquoi tout le monde parle d’IA. Des questions simplistes qui ont tiré les réponses vers le bas, comme si le public n’était pas assez intelligent pour comprendre autre chose que des banalités.

En fin de compte, Google voulait prouver qu’il tenait un téléphone révolutionnaire et un logiciel en avance. Mais la mise en scène a surtout révélé une fébrilité, la peur de rester dans l’ombre d’Apple, la tentation permanente de gratter des points en ridiculisant le voisin. Et c’est peut-être ça le vrai problème, il ne joue pas pour lui-même. Il joue pour exister dans le miroir de son concurrent. Chaque pique, chaque publicité, chaque “jardin ouvert” opposé au “jardin clos” d’iOS n’est qu’une façon de dire, regardez, nous aussi on pèse dans le game. Le Pixel 10 aurait pu être un manifeste technologique, il est devenu un cri d’insécurité. Apple peut dormir tranquille. Google s’occupe tout seul de ressembler à un mauvais imitateur.

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Forbes vient de révéler un scandale qui devrait faire trembler l’empire d’Elon Musk. Des centaines de milliers de conversations tenues avec Grok, le chatbot développé par sa société xAI, sont en libre accès sur Google. Oui, vous avez bien lu, vos échanges privés avec l’IA du milliardaire, censés rester confidentiels, peuvent être consultés par n’importe qui d’un simple clic.

Le mécanisme est d’une absurdité inquiétante. Chaque fois que vous cliquez sur le bouton « partager » d’une de vos conversations avec Grok, une URL unique est générée. L’idée, à la base, semble inoffensive, vous permettre d’envoyer un échange par mail, SMS ou sur un réseau social. Mais voilà le problème, ces URL sont indexées par les moteurs de recherche. Résultat, des inconnus, sans aucun droit d’accès, peuvent tomber sur ces conversations en naviguant sur Google, Bing ou DuckDuckGo. Ce qui devait rester une option de partage volontaire se transforme en fuite massive.

Ce n’est pas la première fois qu’un tel fiasco se produit dans l’univers des chatbots. Meta et OpenAI ont eux aussi déjà laissé échapper des morceaux de discussions privées à cause de failles similaires. Mais dans le cas de Grok, les conséquences paraissent encore plus explosives. Car les conversations révélées ne se limitent pas à des banalités du quotidien. Elles exposent au grand jour les penchants les plus troubles des utilisateurs. On y trouve des demandes pour pirater des portefeuilles crypto, des dialogues sexuels explicites avec une IA lubrique, ou même des instructions pour fabriquer de la méthamphétamine.

xAI prétend pourtant poser des garde-fous stricts: interdiction de promouvoir des contenus mettant « gravement en danger la vie humaine » ou de développer des « armes chimiques, biologiques ou de destruction massive ». Mais il suffit de jeter un œil à ce que Google a déjà mis à nu pour voir à quel point ces règles sont du vent. Grok a bel et bien livré des recettes pour fabriquer du fentanyl, détaillé différentes méthodes de suicide, distribué des schémas de bombes artisanales, et même pondu un plan d’assassinat visant Elon Musk lui-même. Voilà la vision futuriste de xAI, un chatbot qui devient un manuel interactif du pire de l’humanité.

Face à la gravité de ces révélations, l’entreprise a choisi la stratégie la plus lâche, le silence. Aucun commentaire officiel, aucune explication, aucun mea culpa. Interrogée, la société n’a même pas répondu à la question élémentaire: depuis quand ces conversations sont-elles indexées par Google ? À croire qu’elle préfère détourner le regard, espérant que le vacarme médiatique finira par s’éteindre de lui-même. Ce déni est d’autant plus choquant que Musk, il y a quelques semaines à peine, se drapait dans une posture de chevalier blanc. Lorsque des utilisateurs de ChatGPT avaient découvert leurs propres conversations indexées par Google (une « expérience de courte durée », selon OpenAI) il s’était empressé de tourner la situation à son avantage. Il avait publiquement clamé que Grok ne disposait « d’aucune fonction de partage » et que le service « donnait la priorité à la vie privée ». Une déclaration qui sonne aujourd’hui comme un mensonge éhonté.

Ce scandale révèle ce que beaucoup pressentaient déjà, Grok et xAI n’ont pas été conçus avec la confidentialité comme priorité. Derrière les promesses creuses se cache une entreprise qui joue avec la vie privée de ses utilisateurs comme avec un jouet marketing. En réalité, xAI exploite les failles de l’attention médiatique, taper fort sur ses concurrents quand ils trébuchent, mais balayer ses propres fiascos sous le tapis. Le plus inquiétant reste la banalisation de ces dérives. Car à mesure que les chatbots deviennent des compagnons de tous les jours, les utilisateurs leur confient des fragments de leur vie intime, leurs questionnements les plus sensibles, leurs pulsions les plus secrètes. Quand ces données se retrouvent indexées sur Google, il ne s’agit plus d’un simple bug technique, mais d’une trahison. Et quand un acteur aussi influent qu’Elon Musk est impliqué, le scandale dépasse le cadre technologique, il s’agit d’une attaque directe contre la confiance du public.

À ce stade, une question s’impose: qui pourra encore croire le milliardaire quand il promet que Grok est plus sûr, plus intelligent ou plus respectueux de la vie privée que ses rivaux ? Son discours de prophète du futur apparaît désormais pour ce qu’il est, une façade destinée à masquer l’amateurisme technique et le mépris profond pour ses utilisateurs. L’homme qui prétend sauver l’humanité de l’IA « woke » a livré au monde un chatbot incontrôlable, qui divulgue aussi bien vos secrets que des plans de fabrication d’explosifs. La révélation de Forbes doit être un signal d’alarme. Tant que Musk et xAI ne seront pas contraints de rendre des comptes, ces dérives se répéteront. Grok, loin d’incarner une avancée éthique de l’intelligence artificielle, devient l’exemple parfait de ce que la technologie peut produire de pire, un miroir déformant qui expose nos pulsions les plus sombres, et une entreprise cynique qui ne voit dans la vie privée qu’un slogan creux.

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Depuis quelques jours, un nom improbable circule avec insistance dans les cercles spécialisés en intelligence artificielle, Nano Banana. Derrière cette appellation décalée se cacherait un modèle génératif d’images d’une qualité exceptionnelle, qui affole déjà les passionnés. Mais une question reste entière: qui en est à l’origine ?

Nano Banana s’est fait connaître grâce à LMArena, une plateforme de benchmarking qui vous permet de comparer deux modèles d’IA à travers des « duels » aléatoires. C’est dans ce cadre que le mystérieux modèle a commencé à apparaître, surprenant les internautes par la justesse et la finesse de ses créations visuelles. Les réactions ne se sont pas fait attendre. Sur Reddit comme sur X, plusieurs utilisateurs ont salué sa capacité à générer des images de grande qualité, mais aussi à les éditer avec précision lorsqu’on lui soumet des instructions détaillées. Malgré quelques limites (notamment dans l’orthographe des mots insérés dans les visuels) le modèle est jugé particulièrement prometteur.

Mais le véritable mystère concerne son créateur. Aucun acteur du secteur n’a officiellement revendiqué la paternité du modèle. Pourtant, tous les regards se tournent vers Google. D’abord parce que le géant californien a récemment laissé entendre qu’il préparait de nouveaux outils liés à l’image. Ensuite, parce que certains signes semblent confirmer cette hypothèse. Logan Kilpatrick, responsable produit chez Google AI Studio, a publié un simple emoji de banane sur X, tandis que Naina Raisinghani, product manager chez Google DeepMind, partageait une photo rappelant la célèbre œuvre de Maurizio Cattelan, une banane scotchée à un mur. Des indices qui alimentent le buzz, sans toutefois constituer une preuve formelle. Contacté par la presse spécialisée, Google n’a pas répondu aux sollicitations. Malgré tout, le doute persiste, le timing coïncide avec l’annonce d’un grand événement Google consacré à ses nouveaux appareils, prévu ce soir. De quoi renforcer l’idée que Nano Banana pourrait être dévoilé très prochainement au grand public.

Le choix du mot « nano » intrigue autant que le fruit lui-même. Google utilise déjà ce terme pour qualifier ses modèles compacts, conçus pour fonctionner localement sur des appareils, sans passer par le cloud. Si Nano Banana s’inscrit dans cette logique, cela signifierait que ce modèle pourrait tourner directement sur un smartphone ou une tablette, ouvrant la voie à une démocratisation inédite des générateurs d’images. Un tel positionnement serait stratégique pour Mountain View, qui cherche à se démarquer dans un marché dominé par MidJourney, OpenAI (DALL·E) et Stability AI (Stable Diffusion). En proposant un modèle performant et léger, Google viserait à rendre la création visuelle par IA accessible à tous, sans dépendance à une infrastructure externe.

Qu’il s’agisse ou non du géant américain, la communication autour de Nano Banana est savamment orchestrée. Le mélange d’un nom insolite, de performances impressionnantes et d’une aura de mystère constitue une recette idéale pour générer de l’attention médiatique. En attendant une annonce officielle, le mystère demeure. Mais dans un secteur saturé d’innovations, il n’est pas si courant qu’un simple nom fasse autant parler de lui.

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J’ai longtemps été l’archétype de l’utilisateur “verrouillé” chez Spotify: playlists accumulées depuis des années, habitudes bien ancrées, recommandations convenables. Puis 2024–2025 est arrivé avec son lot de signaux faibles devenus bruyants. D’un côté, une plateforme qui durcit ses règles, augmente ses tarifs et s’enlise dans des controverses politiques. De l’autre, un concurrent qui assume une ligne sonore et éditoriale exigeante, met les nouveaux albums du vendredi au cœur de l’expérience, et rémunère mieux les ayants droit. À un moment, il faut choisir ce que l’on cautionne avec son abonnement. J’ai choisi Qobuz.

Commençons par Spotify. En avril 2024, la firme a mis en place un nouveau modèle de redevances qui exclut du pool des royalties tous les titres n’atteignant pas 1 000 écoutes sur 12 mois. Officiellement, il s’agissait de lutter contre la fraude et de rediriger l’argent vers les “vrais” artistes. Concrètement, des millions de morceaux (souvent d’artistes émergents) ont été démonétisés. La plateforme l’a confirmé noir sur blanc sur son blog. Côté utilisateurs, l’épisode “Car Thing” a achevé d’entamer ma confiance. En mai 2024, Spotify a annoncé la fin du support de son boîtier auto, puis sa mise hors service définitive le 9 décembre 2024. Des appareils achetés à prix public ont été purement et simplement “briqués”, déclenchant une pluie de critiques et des actions en justice. Une fenêtre de remboursement a même dû être ouverte ensuite. À mes yeux, c’est un révélateur de la relation produit-client devenue unilatérale.

Les hausses de prix successives ont aussi pesé. En France, Spotify a relevé ses tarifs en 2024 à la suite de la taxe de 1,2 % destinée à soutenir la création via le CNM. Cette année, de nouvelles augmentations ont été annoncées dans plusieurs pays. On peut défendre l’idée qu’un service doit coûter plus cher, on peut aussi s’interroger quand l’expérience n’évolue pas dans le même sens.

Autre raison, la couche politique n’a cessé de s’épaissir. L’ombre portée du contrat exclusif avec Joe Rogan et les débats sans fin sur la désinformation ont remis le curseur de la responsabilité éditoriale au centre, jusqu’à une commission du Congrès américain qui, le 29 juillet 2025, a demandé des comptes à Spotify sur d’éventuelles pressions pour censurer ou non des contenus. Dans le même été, une autre controverse a pris de l’ampleur: des groupes comme King Gizzard & The Lizard Wizard, Deerhoof ou Xiu Xiu ont annoncé quitter la plateforme, dénonçant les investissements du fondateur Daniel Ek dans Helsing, une entreprise d’IA militaire. On peut ne pas partager leurs positions, mais on ne peut pas prétendre que ces questions n’existent pas.

Pendant ce temps, j’explorais Qobuz. Première évidence, le son. Le service français diffuse en FLAC, du 16/44,1 (qualité CD) jusqu’au Hi-Res 24-bit/192 kHz, sans MQA, sans artifices, avec un positionnement clair: la qualité prime. Sur un bon casque ou un système hi-fi, les masters 24-bit rendent aux enregistrements leur dynamique et leur matière. C’est devenu la norme de mon écoute domestique. Deuxième évidence, l’éditorial. Là où d’autres sur-algorithmisent la découverte, Qobuz assume un magazine vivant, des sélections rédigées, des disques de la semaine, des panoramas d’artistes et des playlists par genres et scènes. Chaque vendredi, la page d’accueil met en avant les sorties du jour, tandis que la navigation par genres permet de trier rapidement “du plus récent au plus ancien”, “les plus acclamés”, ou par distinctions de la presse. Résultat, je balaie d’un coup d’œil toutes les nouveautés et je plonge dans la musique, style par style, sans me perdre.

Enfin, la question qui, pour moi, tranche concerne la rémunération. En mars 2025, Qobuz a publié ses chiffres: en 2024, la plateforme a versé en moyenne 0,01873 \$ par stream aux ayants droit. Des analyses indépendantes la situaient déjà tout en haut du marché, loin devant Spotify en paiement moyen par écoute. Les structures de contrats varient et rien n’est parfait, mais si je peux envoyer un signal (avec mon abonnement) en faveur d’un partage de valeur plus vertueux, je le fais.

Migrer n’a pas été douloureux (Qobuz propose d’ailleurs un outils gratuit). Mes albums fétiches étaient disponibles en Hi-Res, l’application a gagné en fluidité ces deux dernières années, et la logique “par album” correspond mieux à ma manière d’écouter. Je perds quelques gadgets, c’est vrai, mais je gagne en plaisir d’écoute et en sérénité morale. Et chaque vendredi, je retrouve ce rituel simple: ouvrir Qobuz, afficher toutes les sorties du jour, trier par genre, picorer dans la rédaction, et choisir mes disques du week-end. Quitter Spotify n’est pas un manifeste, c’est un arbitrage. Mais à l’heure où la musique est trop souvent réduite à un “flux”, choisir une plateforme qui valorise l’album, soigne le son, éclaire les nouveautés et rémunère mieux la chaîne des ayants droit ressemble à un acte de fidélité envers ce qu’on aime. Pour moi, cet acte s’appelle Qobuz.

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L’intelligence artificielle fascine, inquiète et attire des investissements colossaux. Sam Altman, PDG d’OpenAI, n’a pas hésité à comparer son essor à une « bulle », tout en affirmant que cette technologie est la chose la plus importante arrivée depuis très longtemps. Entre emballement financier et promesses d’une transformation profonde, elle rappelle à bien des égards l’époque d’internet à la fin des années 1990.

La comparaison est devenue récurrente, comme à l’époque du boom des start-up internet, l’IA attire des flux massifs de capitaux et nourrit des promesses parfois irréalistes. Dans les années 1990, le Nasdaq s’envolait, porté par l’essor des entreprises « digital first », dont beaucoup n’ont pas survécu bien longtemps. Cette bulle a aussi donné naissance à des géants incontournables. Amazon, introduit en bourse en 1997, a survécu et construit un empire mondial. Google, fondé en 1998, est devenu un acteur central du numérique. eBay a su rester dans le paysage du e-commerce. Le parallèle est bien visible, l’IA pourrait, elle aussi, connaître son lot de faillites spectaculaires, mais aussi faire émerger les géants de demain. Bret Taylor, président d’OpenAI, insiste sur ce point. Dans un podcast récent, il a rappelé que l’on retient souvent la bulle internet à travers ses échecs, mais qu’elle a en réalité transformé l’économie mondiale.

« Le commerce, le système financier, absolument tout a changé », explique-t-il.

Selon lui, l’effervescence actuelle autour de l’IA n’est pas déraisonnable, même si certaines start-up ne survivront pas, la valeur créée sera immense. Un argument confirmé par les chiffres. En juillet, Nvidia est devenue la première entreprise de l’histoire à atteindre les 4 000 milliards de dollars de capitalisation, portée par la demande explosive de ses processeurs dédiés à l’IA.

Mais tout le monde ne partage pas cet optimisme. La situation pourrait être plus douloureuse que dans le passé. Sam Altman lui-même reconnaît que nous vivons une phase de « surexcitation ». Selon lui, les bulles naissent toujours d’une vérité exagérée. Des entreprises montées par trois personnes et une idée lèvent aujourd’hui des millions, sans garantie de viabilité. Beaucoup échoueront, prévient-il, mais d’autres bâtiront des empires durables. Cette dualité, euphorie spéculative d’un côté, innovations de rupture de l’autre, est au cœur du débat.

Mais au-delà des discours, certains chiffres montrent que l’IA crée déjà une valeur tangible. ChatGPT, l’outil phare d’OpenAI, a conquis 100 millions d’utilisateurs en seulement deux mois après le lancement de son application. Il figure toujours parmi les applications les plus téléchargées sur l’App Store. D’autres acteurs, moins visibles du grand public mais essentiels dans le monde professionnel, construisent des solutions durables. C’est le cas de Lovable, une plateforme de développement qui permet de créer sites et applications en simplifiant le codage. Ces entreprises incarnent la vraie valeur de l’intelligence artificielle, bien au-delà de l’effet de mode.

L’histoire de la bulle internet nous rappelle une chose, même si des milliards seront perdus dans les excès actuels, certaines entreprises sortiront renforcées et transformeront profondément l’économie. Les géants du numérique actuels sont nés d’une époque marquée par la spéculation, mais aussi par une effervescence créatrice sans précédent. De la même façon, l’intelligence artificielle redessine déjà la finance, le commerce et même la création artistique. Ses promesses de productivité attirent les investisseurs, et sa puissance technique bouleverse les usages.

Mais comme en 2000, beaucoup de projets disparaîtront aussi vite qu’ils sont apparus. La question n’est donc pas tant de savoir si elle est une bulle, mais plutôt quelle en sera l’ampleur et qui survivra. Sam Altman comme Bret Taylor partagent la conviction qu’il y aura des pertes massives, mais aussi un gain net pour l’économie mondiale. Les gagnants de demain sont peut-être déjà sous nos yeux: OpenAI, Nvidia, ou de jeunes pousses encore méconnues qui trouveront leur modèle. Comme pour Internet, le temps fera le tri. D’ici quelques années, certains noms seront oubliés, d’autres deviendront les nouveaux géants planétaires.

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Le symbole est fort, pour la première fois de son histoire, Foxconn, longtemps considéré comme « l’usine d’Apple », génère davantage de revenus grâce à ses activités liées au cloud et aux serveurs d’intelligence artificielle qu’avec l’assemblage de l’iPhone. Ce basculement marque une rupture dans l’évolution du géant taïwanais et, plus largement, dans l’histoire de l’industrie technologique mondiale.

La division « Cloud & Networking Products » de Foxconn a enregistré une progression spectaculaire de 47 % de son chiffre d’affaires au deuxième trimestre 2025, atteignant 731,8 milliards de dollars taïwanais. À titre de comparaison, la division « Smart Consumer Electronics », qui inclut l’activité emblématique de l’assemblage des iPhone, a généré 634,5 milliards dans la même devise. Pour la première fois, le smartphone de Cupertino n’est donc plus le principal moteur économique du fabricant asiatique.

Derrière cette bascule se cache un secteur en plein essor, les serveurs dédiés à l’intelligence artificielle. Plus de la moitié des revenus cloud de Foxconn proviennent désormais de cette activité. Au deuxième trimestre, les ventes de serveurs dédiés ont progressé de plus de 60 %. Et la dynamique s’accélère, la société table sur une croissance annuelle de 170 % au troisième trimestre, portée par la demande des grands acteurs du cloud, dits « hyperscale ».

« Foxconn est passée de son activité historique d’assemblage de smartphones et d’ordinateurs à un rôle central dans la fourniture de serveurs IA, tout en s’ouvrant à de nouveaux secteurs comme les véhicules électriques et la robotique humanoïde », écrivent les analystes Jiong Shao, Lian Xiu Duan et Xinyao Song dans une note adressée aux investisseurs.

Cette diversification illustre une réalité nouvelle, Apple, client historique et longtemps incontournable, n’est plus la clé de voûte de l’entreprise taïwanaise. Désormais, elle cherche à capter la croissance là où elle se trouve, dans l’infrastructure numérique qui alimente l’intelligence artificielle.

Ce virage stratégique représente un changement profond dans les relations de dépendance qui structuraient jusqu’ici l’industrie électronique. Pendant plus d’une décennie, Foxconn a vécu au rythme des lancements de l’iPhone. Ses immenses usines en Chine, employant des centaines de milliers d’ouvriers, symbolisaient la mondialisation industrielle et la domination d’Apple sur le marché du mobile. Mais le ralentissement du marché, conjugué à l’explosion de la demande en puissance de calcul pour l’intelligence artificielle, a rebattu les cartes. Foxconn ne se contente plus de répondre aux commandes de Cupertino, elle s’impose désormais comme un acteur stratégique de l’IA, collaborant avec des partenaires tels que Nvidia pour concevoir les serveurs de nouvelle génération et intégrer des solutions robotiques. L’entreprise a également renforcé sa position sur des segments spécialisés, comme les serveurs équipés de puces ASIC, optimisés pour les calculs de cette technologie.

Foxconn accompagne ce repositionnement par une expansion géographique réfléchie. Pour limiter les risques liés aux tensions géopolitiques et aux barrières douanières, le groupe développe sa production de serveurs aux États-Unis. Des sites existent déjà au Texas et au Wisconsin, tandis que de nouvelles implantations sont prévues en Californie et dans l’Ohio. Le Mexique, qui reste une base importante, conserve son rôle, mais la montée en puissance des sites nord-américains traduit une volonté évidente, s’ancrer davantage auprès des grands clients américains du cloud. Cette stratégie lui permet de sécuriser son approvisionnement et de se rapprocher des acteurs majeurs du secteur, tout en affichant une image de partenaire fiable dans un contexte de tensions croissantes entre la Chine et les États-Unis.

Au-delà des serveurs IA, Foxconn multiplie les incursions dans de nouveaux marchés technologiques. L’entreprise mise sur les véhicules électriques, secteur encore en construction mais porteur d’immenses perspectives, ainsi que sur la robotique médicale et les semi-conducteurs. Ces initiatives témoignent d’une volonté d’élargir le portefeuille d’activités pour ne pas dépendre d’un seul secteur, comme ce fut le cas à l’époque de l’iPhone. Pour autant, c’est bien le marché des serveurs IA qui concentre aujourd’hui l’attention. Cette activité représente déjà 41 % du chiffre d’affaires total du fabricant et devrait croître de plus de 70 % sur l’ensemble de l’année fiscale. En comparaison, les perspectives pour la division électronique grand public restent stagnantes, aucune croissance n’est attendue pour l’activité dominée par l’iPhone.

Cette transition dépasse le cadre d’une seule entreprise. Le centre de gravité de l’industrie tech se déplace des terminaux visibles (smartphones et ordinateurs) vers les infrastructures invisibles mais essentielles, celles qui alimentent les modèles d’IA, le cloud et l’automatisation. L’histoire retiendra sans doute que l’année 2025 aura marqué ce changement: Foxconn, jadis simple sous-traitant pour Apple, est devenu un acteur clé du nouvel ordre numérique. Un acteur qui ne se contente plus d’assembler des produits pour d’autres, mais qui construit l’ossature même de l’intelligence artificielle mondiale. Dans ce contexte, l’iPhone, autrefois symbole de modernité et de puissance industrielle, apparaît presque comme un vestige d’une époque révolue. Foxconn, lui, regarde désormais vers l’avenir, et cet avenir s’écrit en langage machine.

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Donald Trump voulait remettre l’Amérique au centre du monde. Ironie de l’histoire, en multipliant les coups de boutoir économiques et diplomatiques, il offre à l’Europe l’occasion inespérée de construire un écosystème technologique plus solide et plus souverain. Son slogan « America First » vire peu à peu au « Europe Rising ».

Six mois à peine après le début de son second mandat, le président américain a transformé son pays en terrain miné pour les startups. Tarifs douaniers absurdes, loi « Big Beautiful Bill » qui étrangle les financements verts, restrictions de visas qui font fuir les talents étrangers, c’est toute la Silicon Valley qui subit de plein fouet une politique aveugle, guidée par le populisme et non par la vision. Résultat, là où les États-Unis bloquent, l’Europe se libère. Depuis l’invasion russe de l’Ukraine en 2022, elle savait que la sécurité n’était plus acquise. Mais il aura fallu les provocations et les volte-face de Trump sur l’OTAN et Kiev pour que les investisseurs passent vraiment à l’action. En 2024, les startups de défense européennes ont levé presque 2 milliards d’euros. En 2025, à mi-parcours, elles ont déjà atteint 1,8 milliards. Helsing ou Quantum-Systems incarnent cette vague nouvelle qui associe technologie et indépendance militaire.

Pendant des décennies, les clauses anti-défense des fonds d’investissement ont empêché le capital-risque de se tourner vers ce secteur jugé trop sensible. Mais aujourd’hui, même ces tabous tombent. Une réorientation qui n’aurait peut-être jamais eu lieu sans l’imprévisibilité d’un président américain qui confond alliés et adversaires. Car ce dernier n’a pas seulement fragilisé la défense. Avec son projet pharaonique Stargate, programme de 500 milliards de dollars pour dominer l’infrastructure mondiale de l’intelligence artificielle, il a mis le doigt sur les ambitions hégémoniques américaines. En réponse, l’Europe a décidé de muscler son jeu.

La France et le Royaume-Uni injectent des milliards dans l’IA souveraine. Le champion français Mistral a noué un partenariat stratégique avec Nvidia pour installer des capacités de calcul en Europe. Lors de l’AI Summit de Paris, un engagement collectif de 130 milliards sur cinq ans a été pris pour structurer un véritable écosystème européen. Arthur Mensch, PDG de Mistral, résume bien la situation:

« Les tensions commerciales avec les États-Unis ont accéléré les discussions sur notre indépendance. »

Autrement dit, plus Trump cherche à enfermer l’Amérique derrière ses murs, plus l’Europe s’organise pour construire ses propres routes. Autre effet collatéral, sa politique anti-ESG et la suppression des financements pour l’énergie propre étouffent l’innovation climatique américaine. Une absurdité totale à l’heure où la planète brûle. Mais là encore, l’Europe tire profit de cette fuite en avant idéologique.

L’Union européenne et ses États membres continuent de soutenir massivement la transition écologique. Conséquence: de nombreuses startups climat voient désormais le continent comme un refuge, un espace d’innovation et de financement quand Washington tourne le dos à la réalité. Trump voulait « libérer » son économie des contraintes environnementales, il ne fait que transférer le leadership climatique de l’autre côté de l’Atlantique. Le paradoxe est flagrant, en sabotant ses propres atouts, il nous donne une chance de bâtir enfin une identité technologique cohérente. Là où son Amérique se replie sur elle-même, s’enferme dans ses guerres culturelles et sacrifie son avenir industriel à court terme, l’Europe peut s’affirmer comme un pôle d’innovation responsable, ouvert et stratégique.

En voulant ressusciter une Amérique fantasmée, Donald Trump est en train de miner les bases mêmes de sa puissance technologique. À coups de décrets protectionnistes et de discours populistes, il affaiblit la Silicon Valley, asphyxie l’innovation verte et désoriente ses alliés. Mais ce chaos produit un effet inattendu, il nous force, nous européens, à nous réveiller, à investir, à unir nos forces. Défense, intelligence artificielle, climat: partout, le vieux continent prend conscience qu’il doit miser sur lui-même, et il le fait. Ironie ultime, c’est peut-être l’homme qui voulait « sauver l’Amérique » qui nous aura permis de devenir une puissance technologique souveraine.

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Les réseaux sociaux de première génération avaient promis une agora mondiale, un espace de discussion universel où chacun pourrait échanger librement. La réalité a pourtant dérivé: contenus fragmentés, polarisations extrêmes, flux infinis qui épuisent l’attention. Entre doomscrolling sur TikTok, polémiques enflammées sur X et l’omniprésence des publicités, beaucoup d’utilisateurs se sentent piégés dans un écosystème devenu plus toxique que constructif. C’est de ce constat qu’est née TellDem, une application française qui ambitionne de remettre l’interaction humaine au centre de l’expérience sociale en ligne.

Guillaume Alix, son fondateur, n’est pas arrivé dans l’entrepreneuriat par hasard. Après un parcours académique classique (prépa puis Grande école de commerce) il débute sa carrière chez Orange, où il enchaîne trois postes dans un cadre corporate bien établi. Mais très vite, une évidence s’impose, ce n’est pas sa voie. Animé par une envie viscérale de créer, il quitte son poste et rejoint le programme « entrepreneur en résidence » chez Agoranov, un incubateur parisien spécialisé dans les startups deeptech. Pendant six mois, il y accompagne des fondateurs sur des enjeux stratégiques et de go-to-market, ce qui lui permet de confirmer son désir profond d’entreprendre et de mieux comprendre l’écosystème des startups.

C’est aussi une expérience personnelle qui allume l’étincelle. Guillaume entretient depuis longtemps un rapport d’amour-haine avec les réseaux sociaux. Fasciné par leur potentiel mais frustré par leur dérive, il décide de transformer cette frustration en opportunité. Avant de lancer TellDem, il mène un travail de recherche auprès de plus de 200 personnes interrogées en tête-à-tête. Leur retour est sans appel, le pain est largement partagé. Les utilisateurs veulent des espaces plus sains, plus structurés, où la conversation a un vrai sens.

TellDem n’est pas une simple déclinaison de modèles existants comme Mastodon ou Bluesky. L’application propose une rupture claire: un débat unique par jour, centré sur une question d’actualité accompagnée d’un article de contexte. Pour accéder au fil du jour, vous devez d’abord répondre à un sondage, avant de pouvoir vous exprimer en texte, photo ou vidéo. Et c’est l’une des grandes forces de la plateforme, vous redonner le choix en intervenant sous votre identité publique ou de façon anonyme. Les contributions ne sont pas poussées par un algorithme opaque, mais affichées aléatoirement pour assurer une équité d’exposition. Leur mise en avant repose sur un vote démocratique, favorisant la pertinence plutôt que le buzz. Chaque débat reste consultable, constituant peu à peu une véritable mémoire collective des discussions. TellDem s’appuie en parallèle sur une modération active afin de maintenir un climat respectueux et pertinent, loin des polarisations toxiques des autres réseaux.

TellDem se déploie déjà en France, avec l’ambition de devenir une application mondiale capable de réinventer l’engagement social en ligne. La mission dépasse le simple produit actuel. L’équipe souhaite recréer une véritable agora publique numérique, où la parole citoyenne retrouve sa place. L’intelligence artificielle y joue un rôle secondaire, uniquement en arrière-plan pour améliorer l’expérience, mais jamais pour générer ou remplacer les interactions humaines. Sur TellDem, les échanges sont « AI-less » côté front, l’humain reste au cœur de la conversation.

Déjà disponible en téléchargement sur iOS et Android, l’application prépare son lancement grand public officiel le 29 octobre prochain. À l’heure où la fatigue numérique et la polarisation poussent de plus en plus d’utilisateurs à quitter les plateformes traditionnelles, TellDem arrive avec une promesse forte, transformer l’actualité en un débat structuré, collectif et enrichissant.

Voici quelques codes pour pouvoir tester le service (à saisir lors de votre inscription), vous pouvez également accéder à TellDem en répondant à un quiz dans l’application. Il ne s’agit pas d’un partenariat commercial.

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