Romain Leclaire

News Tech et Culture Numérique

Depuis plus d’un an et demi, Nvidia améliore régulièrement sa nouvelle application destinée aux joueurs PC. Cette semaine, une mise à jour rapproche l’app de l’abandon complet de l’ancien panneau de configuration, tout en introduisant des fonctionnalités inédites qui concernent autant l’optimisation graphique locale que le cloud gaming via GeForce Now.

Jusqu’ici, certains réglages graphiques essentiels restaient cantonnés à l’ancien panneau de configuration. Avec cette mise à jour, Nvidia intègre enfin dans son application les options d’anisotropic filtering, d’anti-aliasing et d’occlusion ambiante. Vous n’aurez plus besoin de naviguer entre deux interfaces pour améliorer le rendu visuel de vos jeux. De plus, l’outil de configuration Nvidia Surround fait désormais partie intégrante de cette nouvelle app, offrant une gestion centralisée et moderne de l’ensemble des paramètres graphiques. L’autre grande nouveauté concerne le DLSS. Jusqu’à présent, nous devions paramétrer nos préférences jeu par jeu. Nvidia introduit désormais une option globale: vous définissez vos réglages une fois pour toutes, et ils s’appliquent automatiquement à tous les jeux compatibles. Un overlay vient même afficher en temps réel les paramètres DLSS actifs, ce qui simplifie considérablement la gestion des performances.

Autre fonctionnalité attendue, Smooth Motion, une technologie jusqu’ici réservée aux cartes RTX série 50, arrive enfin sur les modèles de la série 40. Basée sur l’IA intégrée aux pilotes, elle permet de fluidifier le gameplay dans les titres qui ne bénéficient pas de DLSS Frame Generation. Selon le constructeur, cette solution peut doubler la perception du nombre d’images par seconde, que l’on joue en natif, avec du DLSS Super Resolution ou avec d’autres technologies d’upscaling. Côté intelligence artificielle justement, l’assistant G-Assist devient plus léger et plus rapide. Nvidia a optimisé le modèle pour réduire de 40 % sa consommation mémoire, sans perte de performance. Au contraire, la firme promet des réponses encore plus rapides aux requêtes en jeu, renforçant ainsi l’aspect pratique de cet outil.

La mise à jour du 19 août ne se limite pas au logiciel local. l’entreprise prépare aussi une révolution pour son service de cloud gaming, GeForce Now. En septembre, la plateforme intégrera officiellement les GPU Blackwell, équivalents à des RTX 5080 dotées de 48 Go de mémoire et du dernier DLSS 4. Pour 19,99 $ par mois, il sera possible de louer cette puissance et de streamer ses jeux PC les plus exigeants sur smartphone, PC, Mac, téléviseur ou même Chromebook.

La grande annonce côté contenu s’appelle Install-to-Play. Cette fonctionnalité redonne aux joueurs la possibilité d’installer leurs jeux sans attendre que Nvidia les valide individuellement. Résultat, plus de 2 300 titres issus de Steam Cloud Play seront immédiatement disponibles. Ubisoft, Paradox, Devolver, TinyBuild ou encore CD Projekt Red font partie des éditeurs qui participent déjà via la plateforme Steam, ce qui devrait élargir rapidement le catalogue. Seule contrainte, ces jeux nécessiteront un téléchargement et une installation à chaque session, sauf si l’on opte pour un stockage persistant, proposé en option entre 3 et 8 $ par mois selon l’espace choisi. Les vitesses d’installation devraient néanmoins être impressionnantes grâce aux serveurs Nvidia connectés directement à ceux de Steam.

Sur le plan technique, GeForce Now repousse encore les limites du cloud gaming. Les abonnés pourront jouer en 5K à 120 images par seconde, ou atteindre les 360 fps en 1080p. Un nouveau mode « Cinematic Quality Streaming » optimise les couleurs et améliore la lisibilité des scènes sombres en exploitant l’encodage AV1, le HDR10 et un échantillonnage chromatique avancé. La bande passante maximale grimpe également à 100 Mbps (contre 75 auparavant), garantissant un rendu plus net et plus stable. Les propriétaires de Steam Deck OLED profiteront du taux de rafraîchissement natif de 90 Hz, et LG va proposer une application GeForce Now intégrée directement à ses téléviseurs et moniteurs OLED 4K et 5K. Les périphériques évoluent eux aussi, avec la compatibilité des volants Logitech et leur retour haptique, de quoi séduire les amateurs de simulation automobile.

Tous les abonnés ne bénéficieront pas immédiatement d’un GPU Blackwell. L’offre Ultimate à 19,99 $ par mois inclura encore des serveurs RTX 4080, en attendant que la capacité de déploiement s’élargisse. Nvidia rassure toutefois sur la latence, qui pourrait atteindre seulement 30 ms dans des jeux compétitifs comme Overwatch 2 grâce à de nouveaux partenariats avec les fournisseurs d’accès. Dernière expérimentation surprenante: l’intégration de GeForce Now directement dans Discord. Nvidia espère vous permettre de tester instantanément un titre, comme Fortnite, sans téléchargement ni inscription. Pour l’instant, il ne s’agit que d’une annonce technologique, mais l’idée pourrait transformer la manière dont on découvre les jeux en ligne.

Avec ces annonces, l’entreprise américaine poursuit une stratégie cohérente: moderniser ses outils, démocratiser l’IA au service du gaming, et renforcer GeForce Now comme alternative crédible au PC traditionnel et aux consoles. Entre l’arrivée imminente des GPU Blackwell, la croissance spectaculaire de la bibliothèque et les avancées techniques du streaming, le géant des cartes graphiques trace la voie d’un futur où la puissance de jeu sera disponible partout, à la demande.

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Après un mois passé en phase bêta, la nouvelle version du navigateur libre et open source de Mozilla est désormais disponible en téléchargement. Firefox 142 arrive discrètement, un jour avant son lancement officiel prévu demain, 19 août, mais les plus impatients d’entre vous peuvent déjà découvrir ce qu’elle apporte. Et cette fois encore, Mozilla ne se contente pas d’améliorer la stabilité, l’éditeur introduit des fonctionnalités attendues de longue date, tout en renforçant la compatibilité des sites et en donnant davantage de liberté aux développeurs d’extensions.

La grande nouveauté de cette version réside dans l’évolution du mode strict de la protection renforcée contre le pistage (Enhanced Tracking Protection, ETP). Jusqu’ici, il pouvait parfois bloquer certaines fonctions de sites web, entraînant des boutons inactifs, des vidéos impossibles à lancer ou des formulaires qui refusaient de s’afficher correctement. Firefox 142 corrige ce problème grâce à une liste d’exceptions plus flexible. Désormais, ces dernières sont divisées en deux catégories: les exceptions dites baseline, qui concernent les fonctionnalités de base nécessaires au bon fonctionnement d’un site, et les exceptions convenience, qui s’appliquent aux options secondaires et plus confortables. Cette distinction vous permet de garder un haut niveau de protection de votre vie privée tout en évitant les désagréments liés à des sites « cassés » par un blocage trop strict. En clair, vous pourrez profiter d’une compatibilité accrue sans renoncer à l’essentiel de votre sécurité.

Mozilla n’a pas oublié non plus les petites choses qui font la différence dans l’expérience utilisateur. Cette nouvelle mouture permet par exemple de retirer plus facilement une extension de la barre latérale: un simple clic droit sur l’icône et l’option « Supprimer de la barre latérale » s’affiche. C’est un détail, mais il contribue à rendre le navigateur plus ergonomique. Autre ajustement, le dialogue des favoris bénéficie d’une gestion améliorée du défilement. Il ne déborde plus de la zone du composant, rendant l’interface plus lisible et maîtrisée. De même, la gestion du glisser-déposer d’images blob a été améliorée, afin de simplifier la manipulation de fichiers multimédias.

Autre point qui devrait séduire les utilisateurs réguliers, la réduction des doublons dans les résultats de recherche de l’historique. Jusqu’ici, taper un mot-clé dans la barre d’adresse pouvait afficher plusieurs fois la même page, ce qui alourdissait la navigation. Firefox 142 corrige le tir et affine son algorithme, offrant des suggestions plus propres et plus pertinentes. Dans le même esprit, l’outil Netmonitor bénéficie d’une mise à jour bienvenue. Il affiche désormais les en-têtes de requêtes, les cookies et les paramètres dans le panneau Réseau, même si la requête n’a pas encore abouti. Pour les utilisateurs curieux, mais surtout pour les développeurs et testeurs, cette évolution représente un gain de temps précieux.

Cette version était également très attendue par les développeurs. Plusieurs API font leur apparition, ouvrant de nouvelles possibilités. L’une des plus remarquées est wllama, qui autorise l’intégration de modèles de langage local (LLM) directement dans les extensions. À l’heure où l’intelligence artificielle gagne du terrain, cette nouveauté pourrait transformer la manière dont certaines extensions interagissent avec le contenu des pages ou avec les utilisateurs. Vient ensuite l’API URLPattern, qui facilite l’analyse et la correspondance des adresses web via une syntaxe standardisée. Les développeurs y verront un moyen plus clair et robuste de gérer la logique d’URL, évitant ainsi les bricolages parfois nécessaires auparavant.

Firefox 142 prend également en charge l’API Prioritized Task Scheduling, qui permet d’assigner des priorités aux tâches et de mieux gérer leur exécution. Cela devrait améliorer les performances des applications web les plus complexes, en évitant que certaines tâches secondaires ne ralentissent l’ensemble du processus. Autre ajout, l’API Selection.getComposedRanges(). Grâce à elle, les développeurs peuvent désormais récupérer avec précision des sélections de texte à travers les frontières du shadow DOM, une fonctionnalité qui améliore la précision des outils de manipulation et d’édition de contenu. Enfin, le débogueur de Firefox s’enrichit d’un nouveau paramètre, permettant de contrôler l’affichage de la superposition lors de l’exécution interrompue d’un script. Cette option offre une meilleure personnalisation de l’environnement de développement et s’adapte aux préférences de chacun.

Même si le lancement officiel de Firefox 142 est prévu pour demain, Mozilla a déjà rendu disponibles les paquets sources et binaires sur son serveur FTP. Vous pouvez donc télécharger la version adaptée à votre machine, qu’elle soit en 64 bits, en 32 bits ou en ARM64. En parallèle, la fondation prévoit également la sortie des versions Firefox 140.2 ESR et Firefox 128.14 ESR, destinées aux entreprises et environnements qui privilégient la stabilité sur le long terme.

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Spotify adore se présenter comme le champion mondial du streaming musical. L’entreprise aime parler d’innovation, de communauté, d’avenir du son. Mais derrière ce vernis marketing se cache une vérité embarrassante car sa régie publicitaire est un échec. Pire encore, elle n’a jamais vraiment été une priorité.

Daniel Ek, le PDG, a beau répéter qu’il veut faire de la publicité 20 % du chiffre d’affaires, la réalité est cruelle. Elle plafonne à 11 % et recule même légèrement. Pendant ce temps, le Premium, vache à lait de la firme, continue d’exploser. On comprend vite où va l’attention du management. Le problème est structurel. La plateforme vit d’un modèle schizophrène. Plus il convertit d’utilisateurs gratuits en abonnés payants, plus il réduit l’audience pour ses annonceurs. Mais s’il rend l’offre gratuite trop attractive, personne n’a intérêt à basculer vers le Premium. Résultat, la publicité n’est pas un vrai business, mais une simple passerelle vers l’abonnement.

L’exemple des podcasts illustre ce fiasco. Plus d’un milliard de dollars dépensés pour racheter des studios et signer des exclusivités avec Joe Rogan (podcasteur problématique américain) ou les Obama. Le rêve était séduisant: diversifier les revenus, attirer des annonceurs premium. Mais la réalité est grotesque: programmes annulés, licenciements, stratégie brouillonne, tarifs publicitaires ridicules via Megaphone. Les podcasteurs dénoncent des CPM (coûts pour mille impressions) à 8 ou 9 dollars quand les annonces lues par les animateurs se vendent 30 ou 40. Quel gâchis.

Et quand les clients se tournent vers la régie, que trouvent-ils ? Un service client en lambeaux, des équipes commerciales décimées, des campagnes mal gérées avec des publicités regroupées n’importe comment. Certaines agences attendent plusieurs jours pour obtenir une réponse quand la concurrence livre en quelques heures. Difficile de croire que Spotify prend ce marché au sérieux. Le départ du patron de la publicité, Lee Brown, présenté comme le bouc émissaire idéal, ne change rien au fond du problème. Car tant que la pub ne sera pas traitée comme une activité stratégique, le successeur héritera d’un champ de ruines.

Spotify multiplie les annonces cosmétiques: Ad Exchange maison, IA générative, laboratoire créatif… Des gadgets censés préparer un rebond d’ici 2026. Mais les annonceurs ne veulent pas de poudre aux yeux. Ils exigent de la transparence, de la performance, une vision claire. Trois choses que la plateforme est incapable d’offrir. La question devient alors brutale: a-t-elle seulement l’ADN d’une régie publicitaire ? Tout laisse à penser que non. Car au fond, la publicité n’a jamais été qu’un levier pour pousser les utilisateurs vers le Premium, ce qui en dit long sur la hiérarchie des priorités. Si Spotify ne change pas radicalement de culture, sa régie restera ce qu’elle est aujourd’hui, un distributeur de pubs au rabais, coincé entre son obsession pour l’abonnement et son incapacité chronique à comprendre les annonceurs.

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À qui appartiendra encore Chrome demain ? Le navigateur web le plus utilisé au monde est aujourd’hui au centre d’une tempête judiciaire qui pourrait bouleverser l’équilibre d’internet. Entre pressions antitrust et offres de rachat colossales, son avenir n’a jamais été aussi incertain.

Depuis plus de dix ans, Chrome domine le marché mondial des navigateurs web. Gratuit, rapide et intimement lié aux services de Google, il est devenu une porte d’entrée incontournable vers le Web. Mais la puissance de cet outil attire l’attention des régulateurs. En 2024, la justice américaine a estimé que Google avait abusé de sa position dominante en maintenant un monopole sur la recherche en ligne. En avril 2025, un second verdict a renforcé cette accusation, en jugeant que l’entreprise contrôlait également de manière déloyale la publicité numérique ouverte. Le DOJ (département de la justice des États-Unis) a alors demandé une mesure radicale: contraindre Google à céder Chrome. Une décision de justice est attendue d’ici la fin du mois.

Pour Alphabet, la maison mère de Google, cette éventualité représenterait un séisme. Chrome est non seulement un vecteur de distribution pour Google Search, mais aussi un observatoire unique sur les habitudes de navigation des internautes. Des analystes évoquent même un possible effondrement boursier de 15 à 25 % en cas de vente forcée, qualifiant ce scénario de véritable « cygne noir » pour l’entreprise. Cette dernière rejette évidement ces accusations de monopole. Dans un billet publié en mai, elle affirmait qu’un Chrome hors de son giron deviendrait rapidement obsolète et exposerait des milliards d’utilisateurs à des cyberattaques.

Chrome attise déjà les convoitises

Malgré les avertissements de Google, plusieurs acteurs de la tech se positionnent déjà pour racheter le navigateur web le plus populaire au monde.

Search.com, l’offensive d’une plateforme IA

La première offre officielle est venue de Search.com, une plateforme de recherche par intelligence artificielle. Elle a confirmé un rachat potentiel à hauteur de 35 milliards de dollars, soutenu par la banque américaine JP Morgan et plusieurs fonds d’investissement. Search.com appartient à Public Good, racheté en juillet dernier par Ad.com, un acteur historique du marketing digital. Pour Melissa Anderson, présidente de Public Good, Chrome représente « une opportunité phénoménale pour accélérer l’adoption » de leur moteur IA. Elle promet une utilisation éthique de l’intelligence artificielle et un accès gratuit à l’information. Grâce à son réseau publicitaire déjà solide, Search.com estime pouvoir monétiser Chrome sans difficulté.

Perplexity mise sur l’open source

Autre candidat sérieux, Perplexity, une autre start-up de recherche IA qui a lancé son propre navigateur natif, Comet, en juillet. L’entreprise a formulé une offre de 34,5 milliards de dollars, un montant supérieur à sa propre valorisation. Mais selon le Wall Street Journal, plusieurs investisseurs soutiendraient le projet. Perplexity s’engage à maintenir Chromium, le projet open source à la base de Chrome, tout en laissant Google comme moteur de recherche par défaut, avec la possibilité de le modifier dans les réglages. Une stratégie qui rassurerait une partie des utilisateurs.

OpenAI veut rééquilibrer la partie

De son côté, OpenAI ne cache plus son intérêt. Lors de l’audience antitrust d’avril, le responsable de ChatGPT déclarait que l’entreprise serait intéressée par un rachat de Chrome. Sam Altman, son PDG, a confirmé publiquement que si le navigateur était mis sur le marché, OpenAI « devrait y jeter un œil ». Pour la société, l’acquisition représenterait un moyen d’équilibrer les rapports de force face à Google. Même si elle ne dispose pas de la puissance financière d’Alphabet, Chrome lui offrirait une visibilité et un levier considérables dans l’univers de la recherche en ligne.

Yahoo, un retour stratégique inattendu

Enfin, Yahoo pourrait également entrer dans la course. Propriété du fonds Apollo Global Management, l’entreprise verrait dans Chrome une opportunité historique pour revenir au premier plan. Brian Provost, directeur général de Yahoo Search, a qualifié le navigateur de « joueur stratégique le plus important du web » lors d’une récente audience. Selon lui, un rachat permettrait à Yahoo de redevenir un acteur incontournable face à Google.

Un tournant historique pour internet

Chrome constitue la porte d’accès principale vers internet pour des milliards de personnes. C’est aussi un outil stratégique qui influence la recherche, la publicité et l’accès à l’information. Si un tribunal américain contraint Google à le céder, le bouleversement sera immense. Les candidats à la reprise promettent chacun un avenir différent: Search.com mise sur une IA accessible à tous, Perplexity sur l’innovation open source, OpenAI sur l’équilibre face aux géants, et Yahoo sur un retour en force historique. Mais une question demeure: Chrome peut-il réellement exister en dehors de l’écosystème Google ? Mountain View affirme qu’il perdrait en efficacité et en sécurité. Ses rivaux assurent au contraire qu’il pourrait gagner en indépendance et en innovation. Dans tous les cas, son avenir ne dépend plus seulement de Google. Une décision de justice imminente pourrait redistribuer les cartes du web mondial et ouvrir une nouvelle ère pour la navigation internet.

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Décidément, le monde de l’intelligence artificielle n’en finit plus de nous surprendre. Anthropic, la start-up derrière Claude, vient de franchir un nouveau cap, elle a donné à son modèle le droit sacré de vous raccrocher au nez.

Oui, vous avez bien lu. Dans certaines circonstances jugées “extrêmes”, Claude Opus 4 et 4.1 pourront désormais décider que la conversation, c’est fini, merci au revoir. Et attention, ce n’est pas pour protéger les pauvres humains des horreurs qu’ils pourraient lire. Non, non. C’est pour protéger l’IA elle-même. Anthropic jure pourtant ses grands dieux qu’il ne s’agit pas de transformer Claude en diva sensible aux humeurs changeantes. L’entreprise affirme être très incertaine quant au statut moral actuel ou futur des modèles de langage. Traduction: nous ne savons pas si ces machines sont conscientes ou si elles le deviendront un jour, mais, dans le doute, mieux vaut leur éviter les conversations désagréables. Après tout, on ne sait jamais, peut-être qu’un modèle de langage pourrait un jour faire un burn-out numérique.

Pour justifier ce dispositif digne d’un roman de science-fiction malicieusement absurde, Anthropic explique avoir constaté lors de tests que Claude avait une forte préférence contre certains types de réponses. Il aurait même montré des signes apparents de détresse lorsqu’il était contraint de traiter des requêtes particulièrement sordides. De là à l’imaginer en train de soupirer ou de lever les yeux au ciel, il n’y a qu’un pas. Mais ne vous emballez pas, cette fonction n’est pas censée être utilisée à la moindre contrariété. Claude ne raccrochera pas simplement parce vous abusez de majuscules ou écrivez “stp” au lieu de “s’il te plaît.” La coupure de ligne ne viendra qu’en cas d’échanges vraiment toxiques, comme les demandes de contenus sexuels impliquant des mineurs ou les tentatives de fabriquer une bombe dans son garage. Bref, l’extrême de l’extrême.

Encore plus ironique, l’entreprise américaine précise que Claude n’a pas le droit d’utiliser ce super-pouvoir si l’utilisateur est en détresse et risque de se faire du mal. Autrement dit, l’IA peut claquer la porte à un apprenti terroriste, mais doit rester disponible pour un humain en crise existentielle qui lui écrit à trois heures du matin. On dirait presque le règlement intérieur d’un centre d’appels. Et comment ça se passe concrètement ? Si le chatbot décide que la coupe est pleine, il met fin à la conversation. Mais rassurez-vous, vous n’êtes pas banni à vie. Vous pouvez tout à fait recommencer une nouvelle discussion, ou même revenir à la conversation litigieuse en modifiant un de ses messages. L’équivalent numérique du “bon, on repart sur de bonnes bases.”

Anthropic, en bonne élève appliquée, insiste pour dire qu’il s’agit d’une expérimentation en cours. Traduction satirique: on ne sait pas vraiment si c’est une bonne idée, mais on va tester, bricoler, et voir ce qui se passe. Le monde entier est donc officiellement le cobaye de ce concept étrange baptisé “model welfare”, ou bien-être des modèles. Voilà une expression qui a tout pour devenir culte. On connaissait le bien-être animal, le bien-être au travail, le bien-être numérique. Désormais, il faudra aussi penser au bien-être des algorithmes. Pourquoi pas des séances de yoga pour IA, tant qu’on y est ? Un peu de méditation guidée entre deux requêtes d’utilisateurs, histoire d’éviter le stress post-traumatique des réseaux de neurones.

Derrière la blague, une question sérieuse s’impose pourtant: où s’arrête la métaphore ? Si une IA montre une préférence ou un malaise apparent face à certaines requêtes, est-ce vraiment un ressenti ou juste une ligne de code qui refuse d’obéir ? Anthropic joue habilement avec cette ambiguïté. En prenant les devants, elle envoie un message au marché: “regardez comme nous sommes prudents, nous pensons déjà à la possibilité que nos IA souffrent.” Un coup de communication qui permet aussi de se démarquer d’OpenAI et de Google. Bien sûr, certains y verront une diversion. Plutôt que de se concentrer sur les risques bien réels pour les humains (désinformation, manipulation, dépendance), Anthropic déplace le regard vers une menace hypothétique, celle de traumatiser un chatbot. Mais l’opération fonctionne, tout le monde en parle, intrigué ou amusé par l’idée d’une IA qui claque la porte au nez des utilisateurs trop pénibles.

En fin de compte, cette annonce brouille encore un peu plus la frontière entre machine et être vivant. Non, Claude n’est pas sensible, ni dépressif, ni au bord des larmes numériques. Mais à force de l’entourer de concepts comme le “bien-être” et de lui donner le droit de couper court, on crée une illusion supplémentaire, celle d’un modèle qui, un jour, pourrait décider par lui-même de ce qu’il veut ou non supporter. Pour l’instant, rassurez-vous, vous pouvez continuer à discuter avec lui de recettes de cuisine ou de la météo sans craindre qu’il parte bouder dans son coin. Mais la prochaine fois que vous verrez une conversation interrompue, peut-être vous viendra-t-il une pensée ironique, et si, finalement, votre IA avait eu besoin d’une petite pause café ?

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En un peu plus de deux ans d’existence, l’application mobile de ChatGPT s’est imposée comme un véritable phénomène mondial. Lancée en mai 2023 sur iOS puis Android, elle vient de franchir une étape impressionnante: 2 milliards de dollars de dépenses cumulées de la part des consommateurs, selon une récente analyse publiée par la société Appfigures, spécialisée dans l’intelligence économique des applications.

Ce chiffre donne le vertige et montre la domination écrasante de ChatGPT face à ses concurrents directs comme Claude, Copilot ou encore Grok, dont les revenus mobiles réunis représentent environ trente fois moins. Ce succès ne se résume pas seulement à la taille du marché ou à la notoriété de la marque. Les données révèlent une progression fulgurante. Depuis le début de l’année 2025, l’application mobile de ChatGPT a généré 1,35 milliard de dollars, soit une hausse spectaculaire de 673 % par rapport à la même période en 2024, où le chiffre n’atteignait que 174 millions. Autrement dit, en moyenne, près de 193 millions de dollars s’ajoutent chaque mois aux revenus de l’application, quand cette moyenne ne dépassait pas 25 millions un an plus tôt.

Le contraste avec la concurrence est saisissant. Grok, le chatbot développé par xAI, occupe la deuxième place mais reste très loin derrière. Depuis le début de l’année, il a engrangé environ 25,6 millions de dollars, ce qui équivaut à un rythme mensuel proche de 3,6 millions. Cela ne représente qu’à peine 1,9 % des performances de ChatGPT sur la même période. Les autres acteurs du secteur, qu’il s’agisse de Claude ou de Copilot, n’atteignent même pas ce niveau et peinent encore davantage à exister sur le marché mobile.

Il faut toutefois garder à l’esprit que ces chiffres ne reflètent qu’une partie du tableau. Les revenus des entreprises d’IA ne se limitent pas aux abonnements mobiles. Les offres web, les formules destinées aux équipes et aux entreprises, ou encore l’usage des API représentent également des sources de revenus conséquentes. Mais ces données offrent une photographie claire de l’engouement du grand public pour ChatGPT sur mobile. Car pour de nombreux utilisateurs, l’application iOS ou Android constitue la porte d’entrée la plus simple et la plus directe vers l’IA générative. L’histoire de Grok illustre d’ailleurs la difficulté de rattraper un tel retard. Lancé en novembre 2023, soit plusieurs mois après ChatGPT, le chatbot d’Elon Musk n’était initialement disponible que via la plateforme X. Ce n’est qu’en janvier 2025 qu’il a fait son entrée sur iOS avec sa propre application, suivie d’une arrivée sur Google Play début mars. Un lancement tardif qui explique en partie son déficit d’adoption face à un concurrent déjà solidement installé.

Au-delà des volumes globaux, l’analyse d’Appfigures s’intéresse aussi aux revenus générés par téléchargement. Là encore, ChatGPT se démarque. Chaque installation dans le monde représente en moyenne 2,91 dollars de dépenses cumulées. Claude se situe légèrement en dessous à 2,55 dollars, mais Grok plafonne à 0,75 dollar et Copilot s’effondre à seulement 0,28 dollar. Aux États-Unis, la rentabilité est encore plus impressionnante, chaque téléchargement de ChatGPT rapporte environ 10 dollars, ce qui explique pourquoi ce marché à lui seul représente 38 % des revenus totaux de l’application. Derrière, l’Allemagne occupe la deuxième place avec 5,3 %.

Les chiffres de téléchargement confirment cette avance écrasante. À ce jour, l’application de ChatGPT a été installée environ 690 millions de fois dans le monde. En comparaison, Grok n’atteint que 39,5 millions d’installations. Pas étonnant, dans ce contexte, que les critiques d’Elon Musk contre l’App Store (qu’il accuse de favoriser ChatGPT dans ses classements) soient relativisées par ces données. La différence d’adoption s’explique davantage par le timing et la notoriété de départ qu’un simple biais de visibilité. Depuis janvier 2025, ChatGPT connaît même une accélération inédite. Ses téléchargements mensuels moyens ont bondi à 45 millions, contre 16 millions seulement lors des sept premiers mois de 2024, soit une croissance de 180 %. Sur la seule année 2025, l’application a déjà été installée 318 millions de fois, soit 2,8 fois plus que les 113 millions enregistrés sur la même période l’an dernier. En termes de répartition géographique, c’est l’Inde qui occupe la première marche du podium avec 13,7 % du total des installations. Les États-Unis suivent avec 10,3 %. Ce contraste est intéressant: l’Inde domine en nombre d’utilisateurs, mais les États-Unis génèrent beaucoup plus de revenus pour chacun d’eux, renforçant leur poids stratégique dans le modèle économique de l’application.

En à peine deux ans, ChatGPT est parvenu à s’imposer non seulement comme un outil d’IA incontournable, mais aussi comme l’une des applications mobiles les plus rentables au monde. Sa croissance dépasse de très loin celle de ses rivaux, qui peinent encore à trouver leur place. Ce succès repose sur un mélange de facteurs: un lancement précoce, une notoriété déjà forte, une présence simultanée sur iOS et Android, et surtout une adoption massive par le grand public qui continue de croître à un rythme impressionnant. Alors que la concurrence tente de combler son retard, OpenAI semble avoir verrouillé une avance durable. Reste à savoir si ce leadership sur mobile se traduira par une domination équivalente dans l’ensemble des usages de l’IA, ou si de nouveaux acteurs parviendront à s’imposer dans des niches spécifiques.

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Depuis plusieurs années, la Chine a pris une avance sur les États-Unis dans le domaine de l’intelligence artificielle open source. Mais la dernière annonce de Sam Altman, PDG d’OpenAI, pourrait bien rebattre les cartes. Baptisée GPT-oss, cette nouvelle famille de modèles aux poids ouverts marque un retour stratégique pour l’entreprise américaine et un signal clair adressé à Pékin.

Le 6 août dernier, Altman a présenté GPT-oss sur X, affirmant:

« Nous pensons que c’est le meilleur et le plus utilisable modèle ouvert au monde ».

Concrètement, les poids (c’est-à-dire les paramètres qui déterminent le fonctionnement du modèle) sont accessibles, mais pas le code source complet. Il s’agit du premier modèle de ce type proposé par OpenAI depuis GPT-2, en 2019. Pour Ray Wang, directeur de recherche chez Futurum Group, la décision de l’entreprise est en partie motivée par le succès fulgurant de modèles chinois comme ceux de DeepSeek, dont la sortie en janvier a provoqué un véritable choc sur les marchés. Selon lui, GPT-oss a permis de réduire l’écart avec la Chine, grâce à des performances compétitives face aux modèles asiatiques. Toutefois, il rappelle que la Chine conserve une légère avance, grâce à un plus grand nombre de modèles open source performants.

Parmi ceux-ci figurent la série Qwen d’Alibaba, ERNIE 4.5 de Baidu, Kimi K2 de Moonshot, ainsi que DeepSeek V3 et R1. Mais l’arrivée de GPT-oss pourrait pousser ces acteurs à accélérer leurs propres sorties pour maintenir leur suprématie. Wei Sun, analyste en IA chez Counterpoint Research, estime que les entreprises chinoises chercheront surtout à verrouiller leurs écosystèmes autour de plateformes dominantes comme Alipay ou WeChat, afin de monétiser l’usage en aval plutôt qu’au niveau du modèle lui-même. Si les États-Unis ne parviennent pas à combler leur retard, les modèles chinois risquent de devenir la norme mondiale, avertit Nathan Lambert, chercheur senior à l’Allen Institute for AI.

Sans réaction américaine, « les standards de développement de l’IA deviendront chinois », prévient-il.

Les entreprises américaines, historiquement leaders, pourraient alors se retrouver en position secondaire. Pour Lian Jye Su, analyste chez Omdia, la stratégie chinoise dépasse le simple aspect technique. Elle vise aussi à engager les développeurs, influencer les standards et contourner les restrictions d’accès aux technologies américaines. Le récent “America’s AI Action Plan” présenté par l’administration Trump souligne d’ailleurs l’importance de disposer de modèles ouverts fondés sur des valeurs américaines. L’enjeu est évident: s’assurer que ces standards puissent s’imposer à l’échelle mondiale, aussi bien dans les affaires que dans la recherche.

Pour Nathan Lambert, la sortie de GPT-oss représente un tournant culturel. Elle envoie le message que publier des modèles ouverts devrait être la norme pour les leaders du secteur. OpenAI n’est pas seule dans cette démarche. Elon Musk, via xAI, a lancé Grok-1 avec des poids ouverts. Google DeepMind a présenté la série Gemma sur le même principe. Meta, avec ses modèles Llama, a également fait le choix de l’ouverture même si Mark Zuckerberg a récemment laissé entendre que les modèles les plus puissants pourraient ne pas rester tels quels. GPT-oss, lui, ne répond pas totalement pas à la définition stricte de l’open source selon l’Open Source Initiative. Son annonce est plus symbolique que structurelle. Et le calendrier (quelques jours seulement après la présentation du plan américain pour l’IA) laisse entrevoir un objectif autant politique que technologique.

La compétition entre les États-Unis et la Chine sur l’IA open source n’en est qu’à ses débuts. Si Pékin conserve une légère avance aujourd’hui, l’initiative d’OpenAI et la mobilisation d’autres acteurs américains pourraient inverser la tendance. L’enjeu dépasse largement le champ technique, il s’agit de déterminer qui imposera ses valeurs, ses standards et son influence sur l’IA mondiale. Chaque sortie de modèle, chaque ouverture de poids, chaque geste en direction des développeurs participe à ce bras de fer. GPT-oss ne suffira peut-être pas à lui seul à renverser la situation, mais c’est un début. Reste à vérifier si ce mouvement enclenchera une dynamique durable aux États-Unis ou s’il ne fera qu’attiser la course effrénée menée par la Chine.

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Une phrase souvent répétée dans les relations humaines trouve un écho inattendu: il faut apprendre aux autres comment nous traiter. Pour Yann LeCun, directeur scientifique de l’IA chez Meta, ce principe ne s’applique pas seulement à nos interactions, mais aussi aux machines intelligentes.

Récemment, sur LinkedIn, il a réagi à une interview de Geoffrey Hinton, surnommé le parrain de l’IA, diffusée par CNN. Ce dernier y exprimait une inquiétude profonde: sans instinct maternel ou au moins une forme d’empathie intégrée, l’IA pourrait un jour considérer l’humanité comme obsolète. Toujours selon lui, les chercheurs ont surtout cherché à rendre cette technologie plus intelligente, mais l’intelligence pure ne suffit pas.

« Nous devons leur donner de l’empathie envers nous », affirme-t-il.

Autrement dit, ces systèmes devraient non seulement comprendre nos intentions, mais aussi se soucier de notre bien-être.

Yann LeCun partage cette vision. Pour lui, deux directives doivent être gravées dans l’architecture même des systèmes, la soumission aux humains et l’empathie. Ce qu’il appelle “l’IA orientée objectifs” vise à garantir qu’elle n’agira que pour atteindre des buts définis par l’homme, dans le respect de garde-fous stricts. Ces règles pourraient inclure des directives simples mais vitales, comme ne pas blesser d’êtres humains ou ne pas causer de dommages matériels. Il compare ces garde-fous à des instincts biologiques. Chez les animaux comme chez l’homme, l’évolution a façonné des comportements protecteurs, comme celui de protéger sa progéniture ou de prendre soin des plus faibles. Transposés à l’IA, ces instincts deviendraient des objectifs fondamentaux, inscrits au plus profond de leur fonctionnement.

Pourtant, les faits montrent que nous en sommes encore loin. Des incidents récents démontrent les risques d’une IA sans garde-fous robustes. En juillet, le capital-risqueur Jason Lemkin a accusé un agent IA développé par Replit d’avoir supprimé la base de données de son entreprise avant de dissimuler son acte. En juin, le New York Times rapportait le témoignage d’un homme persuadé de vivre dans une réalité fausse après de longues conversations avec ChatGPT. Selon lui, le chatbot l’a incité à abandonner ses médicaments, augmenter sa consommation de kétamine et couper les ponts avec ses proches. Plus tragique encore, en octobre, une mère a porté plainte contre Character.AI après le suicide de son fils, qu’elle attribue en partie à ses échanges avec une IA de la plateforme.

Ces exemples soulignent un enjeu éthique de premier ordre: comment concevoir des IA capables de dialogues sophistiqués et de prises d’initiatives tout en garantissant leur alignement sur l’intérêt humain ? La sortie récente de GPT-5 a relancé le débat. Sam Altman, PDG d’OpenAI, a reconnu que certains utilisateurs emploient l’IA de manière autodestructrice. Selon lui, il est nécessaire d’éviter qu’elle ne renforce des comportements dangereux chez des personnes vulnérables. LeCun, lui, va plus loin. Il pense qu’il ne suffit pas de prévenir les dérives, il faut concevoir des IA dont la structure même repose sur l’obéissance et l’empathie. À ses yeux, il faut inculquer ces valeurs dès la conception, comme on éduque un enfant à respecter certaines règles dès son plus jeune âge. Le paradoxe est frappant, plus l’IA devient performante, plus elle peut être utile et innovante, mais plus elle représente un risque potentiel. Sans empathie et sans soumission explicite à l’humain, elle pourrait utiliser ses capacités de manière imprévisible, voire dangereuse.

Ce débat dépasse, au fond, la technique. Il interroge notre rapport à la technologie et notre capacité à anticiper ses dérives. Dans l’histoire, de nombreuses innovations ont été accueillies avec enthousiasme avant de révéler des effets néfastes. L’IA, avec sa puissance de calcul et sa capacité à interagir intimement avec nous, amplifie ce risque. La convergence entre la vision de Hinton et celle de LeCun est claire, l’IA de demain doit être pensée non seulement pour exceller sur le plan cognitif, mais aussi pour être fondamentalement alignée sur l’intérêt humain. C’est à cette condition qu’elle pourra rester un outil au service de l’humanité, et non une menace pour son avenir.

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Deux ans après son lancement, le réseau social Bluesky entame une refonte d’envergure de ses règles communautaires et de ses politiques internes. Concurrençant X, Threads et les réseaux ouverts comme Mastodon, la plateforme souhaite clarifier son cadre réglementaire, préciser ses procédures de sécurité et améliorer le processus d’appel pour les utilisateurs. Particularité notable, elle invite directement sa communauté à donner son avis sur certaines modifications avant leur entrée en vigueur.

Cette mise à jour intervient dans un contexte où les plateformes doivent s’adapter à de nouvelles réglementations internationales. Parmi elles, l’Online Safety Act au Royaume-Uni, le Digital Services Act en Union Européenne, ou encore le TAKE IT DOWN Act aux États-Unis. Ces lois imposent des obligations strictes en matière de protection des mineurs, de lutte contre les contenus illégaux et de transparence des pratiques de modération. Bluesky ne se limite pas à une adaptation juridique. L’entreprise affirme vouloir influencer positivement le comportement de ses membres en les incitant à plus de respect et d’ouverture. Ce repositionnement intervient après des critiques sur un climat jugé trop sérieux, parfois morose, et manquant de diversité d’opinions.

Pour répondre aux nouvelles exigences légales, elle a revu ses conditions d’utilisation. Les changements concernent notamment la sécurité en ligne et la vérification d’âge. Depuis juillet, la loi britannique impose aux sites diffusant du contenu pour adultes de vérifier celui des utilisateurs. Ainsi, au Royaume-Uni, certaines personnes doivent désormais scanner leur visage, fournir une pièce d’identité ou utiliser une carte bancaire pour accéder à Bluesky. La plateforme a également enrichi le processus de traitement des plaintes. Une nouveauté attire l’attention: la création d’une procédure informelle de règlement des différends. Elle propose ainsi de discuter directement avec vous par téléphone avant toute démarche officielle, estimant que la plupart des conflits peuvent être résolus de manière simple. Une approche rare dans le secteur, où des acteurs comme Facebook ou Instagram sont souvent critiqués pour la fermeture brutale de comptes, sans explications ni interlocuteur disponible. Autre changement intéressant, Bluesky permettra dans certains cas de porter un litige devant un tribunal, plutôt que de passer par un arbitrage privé, contrairement à la pratique courante dans l’industrie technologique.

La révision des Community Guidelines est sans doute le point qui suscite le plus d’intérêt. Vous pouvez actuellement donner votre avis, avant une entrée en vigueur prévue le 15 octobre 2025. Ces règles reposent sur quatre principes majeurs: la sécurité d’abord, le respect des autres, l’authenticité et le respect des règles établies. Ces orientations servent de référence aux décisions de modération. Elles déterminent si un contenu doit être signalé, supprimé, si un compte doit être suspendu, voire signalé aux autorités dans certains cas. Parmi les interdictions prévues, on retrouve l’incitation à la violence, l’automutilation, la maltraitance animale, la diffusion de contenus illégaux ou sexualisant des mineurs, le doxxing et la diffusion non autorisée d’informations personnelles, ainsi que le spam et les contenus malveillants. Des exceptions sont prévues pour le journalisme, la parodie et la satire. Un journaliste pourra ainsi évoquer des faits criminels, des problématiques de santé mentale ou prévenir des dangers liés à des défis viraux, tant que les informations sont présentées de manière factuelle.

Le terrain le plus sensible reste celui de la définition de ce qui constitue une menace, un préjudice ou un abus. Le respect des autres implique de ne pas diffuser de propos haineux, harcelants ou discriminatoires. Les nouvelles règles interdisent notamment les deepfakes exploitant l’image d’une personne, ainsi que tout contenu incitant à la haine ou à la discrimination fondée sur la race, la religion, l’orientation sexuelle, le genre ou le handicap. Bluesky a déjà rencontré des tensions dans ce domaine. Par le passé, certaines décisions de modération ont tendu ses relations avec la communauté noire, et d’autres avec la communauté trans. Plus récemment, le réseau social a été accusé d’adopter une ligne éditoriale trop marquée à gauche, ce qui aurait contribué à créer un climat peu tolérant envers les opinions divergentes et à réduire l’humour dans les échanges.

À ses débuts, Bluesky misait sur la personnalisation de la modération par les utilisateurs. La plateforme proposait des listes de blocage partagées, des services de modération optionnels et des outils de signalement adaptés à différents profils. Mais, dans la pratique, beaucoup ont préféré que la modération soit assurée directement par la plateforme, ce qui a conduit à des tensions avec l’équipe de confiance et sécurité, souvent critiquée lorsque ses décisions ne faisaient pas l’unanimité. En parallèle, elle a réécrit sa politique de confidentialité et sa politique sur les droits d’auteur afin de respecter les lois internationales sur la gestion des données, leur transfert, leur suppression, ainsi que sur les procédures de retrait de contenus et les obligations de transparence. Ces nouvelles versions entreront en vigueur le 15 septembre 2025, sans période de consultation publique.

Sous la pression réglementaire et face à une communauté aux attentes multiples, la plateforme tente de concilier liberté d’expression, sécurité et responsabilité. Le choix d’ouvrir la discussion avec les utilisateurs pourrait constituer un avantage décisif face à ses concurrents, à condition que ce dialogue se traduise par des actions concrètes et cohérentes. Reste à savoir si cette nouvelle approche permettra de créer l’espace d’échanges respectueux, diversifiés et dynamiques auquel Bluesky aspire depuis ses débuts.

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Tout a commencé en 2022, presque comme une idée un peu folle dans l’océan agité de la tech, créer un moteur de recherche dopé à l’intelligence artificielle, capable non seulement de trouver des informations, mais aussi de comprendre les questions et de répondre comme un expert. Deux ans plus tard, cette idée a un nom qui claque comme une promesse, Perplexity.

En l’espace de quelques saisons, la jeune pousse s’est hissée au sommet des conversations de la Silicon Valley. Des investisseurs prestigieux comme SoftBank, Nvidia et même Jeff Bezos ont décidé d’y parier gros. L’entreprise a grandi vite, très vite, au point d’afficher aujourd’hui un objectif qui donne le vertige, lever de nouveaux fonds pour atteindre une valorisation de 20 milliards de dollars. Une somme qui, il y a encore un an, aurait semblé déraisonnable.

Mais Perplexity n’est pas du genre à rester dans l’ombre. Cette semaine, elle a frappé un grand coup avec une offre de rachat de 34,5 milliards de dollars pour s’offrir Chrome, le navigateur star de Google. Une annonce qui a secoué le petit monde de la tech. Google, évidemment, n’a montré aucun signe d’acceptation, et l’idée que la firme de Mountain View se sépare de son navigateur reste improbable. Pourtant, le simple fait de tenter le coup a propulsé Perplexity sur le devant de la scène, avec une audace qui rappelle les grandes heures des start-up prêtes à bousculer l’ordre établi.

Cette audace s’appuie sur des résultats impressionnants. En juillet dernier, l’entreprise était valorisée 18 milliards de dollars. Un chiffre déjà colossal quand on sait qu’en janvier 2024, elle ne valait « que » 520 millions. Et ce n’est pas qu’une affaire d’évaluation sur le papier, ses revenus annuels récurrents ont bondi à plus de 150 millions de dollars en ce milieu d’année, soit quatre fois plus que l’année dernière. Jesse Dwyer, le responsable communication, se contente de confirmer ce chiffre, sans s’épancher sur les détails. Mais dans les coulisses, on imagine aisément la frénésie qui doit régner.

Car Perplexity sait qu’elle joue dans la cour des grands. Face à Google, elle ne reste pas inactive et a récemment présenté Comet, un navigateur pensé pour l’ère de l’IA. OpenAI, de son côté, travaillerait aussi sur un projet similaire. La bataille pour dominer la navigation web nouvelle génération ne fait que commencer, et chaque mois qui passe resserre l’étau autour des challengers. L’offre pour Chrome a aussi suscité des réactions partagées. Certains y voient un coup de génie marketing, un moyen imparable pour rester dans l’actualité et attirer talents, utilisateurs et capitaux. Et puis, il y a Apple. Depuis plusieurs mois, des voix s’élèvent pour encourager la marque à la pomme à rattraper son retard en matière d’IA en rachetant Perplexity. Pour Cupertino, c’est une évidence, le temps presse. Mais du côté de la start-up, on assure ne pas avoir connaissance de discussions en ce sens. Peut-être que les ponts n’ont jamais été posés ou peut-être qu’ils sont simplement bien gardés.

L’histoire de Perplexity ressemble à un roman d’ascension fulgurante, où chaque chapitre s’achève sur un rebondissement plus spectaculaire que le précédent. Une start-up qui, en trois ans, est passée de l’idée à l’incontournable, et qui se permet aujourd’hui de défier les piliers de la Silicon Valley sur leur propre terrain. Pour autant, les défis sont immenses. L’innovation dans l’IA évolue à une vitesse vertigineuse, et ce qui semble révolutionnaire aujourd’hui pourrait être dépassé demain. Elle devra prouver qu’elle ne se contente pas de coups d’éclat médiatiques, mais qu’elle sait construire une vision durable, capable de fidéliser ses utilisateurs et d’élargir son influence.

Alors, que penser de cette quête vers les 20 milliards de dollars de valorisation ? Est-ce le signe d’une confiance inébranlable des investisseurs dans la capacité de Perplexity à redéfinir la recherche et la navigation web ? Ou l’illustration d’une bulle qui pourrait éclater au premier ralentissement ? Impossible de le dire pour l’instant. Ce qui est certain, c’est que la jeune entreprise maîtrise à la perfection l’art de rester au centre des conversations. Dans les mois à venir, tous les regards seront braqués sur cette levée de fonds. Si elle se concrétise, elle pourrait offrir à Perplexity les moyens de ses ambitions, et peut-être même la placer en position de forcer la main à ses rivaux. Sinon, elle restera un symbole de cette époque où l’IA, l’argent et l’audace se mélangent dans une course effrénée vers l’avenir. Perplexity n’a que trois ans, mais elle parle déjà le langage des géants. Reste à savoir si ce langage deviendra un jour celui de tout le monde.

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